Appel à contributions

Cet appel est clos depuis le 1er décembre 2017 ****

Quelques exemples de thématiques de contributions attendues et de leur problématisation :

1)      Des contributions sur des mobilisations politiques (« manif’ pour tous », dénonciation de la « théorie du Gender » par le collectif Justice Respect pour l'Enfance – JRE – de F. Belghoul), mais aussi sur différentes formes de sécession silencieuse ou de contestation violente (salafisme), voire de meurtre de masse (djihadisme). Quels registres de mobilisation ? Quels thèmes ?  Quels messages ?

2)      Des approches centrées sur les dérives/emprises sectaires, y compris politiques (Le Tallec, 2006), ainsi que lescult organizations telles que l’Église de scientologie, le mouvement raelien, le renouveau charismatique, les twelve tribes, ou encore Aum Shinrikyō seront également les bienvenues. Comment ces phénomènes se mettent-ils en place, quels rapports avec les formes extérieures de sociabilité/socialisation, comment et par quels outils et stratégies ces organisations en viennent-elles à caporaliser l'ensemble des domaines de la vie quotidienne de leurs adeptes ? En d'autres termes, comment se traduit ou se construit concrètement leur caractère hégémonique (Bates, 1975) ? Quels soutiens formels ou informationnels, manifestes ou latents, explicites ou implicites ces mouvements trouvent-ils dans les politiques publiques (non) mises en œuvre ? Quels stratégies ces groupes sectaires développent-ils pour se rendre acceptables si ce n'est légitime aux yeux des autorités. Parallèlement, dans une perceptrice continuiste ? Quels relais, appuis ou soutiens trouvent-ils auprès du public au sens large : réseaux sociaux, musique, programmes télévisés, magazines généralistes, presse people, cinéma, etc. ?

3) Les mouvements intégralistes investissent l’espace économique, notamment les institutions et normes marchandes qui, sous l’impulsion de la mondialisation néo-libérale, échappent de façon croissante aux contrôles des États.  Loin de contrecarrer le déploiement du capitalisme et de l’économie marchande, ils s’y épanouissent, prennent appui sur le marché et y creusent des « niches économiques ». On peut penser ici au marché dit « halal » et au consumérisme islamique (Bergeaud-Blackler, 2015 et 2017 ; Bergeaud-Blackler et alii, 2016). On peut également songer aux entrepreneurs évangéliques de la droite chrétienne américaine, qui sont aussi des zélateurs d’un fondamentalisme marchand (Williams, 2010 ; Miller 2014 ; Ingersoll, 2015 ; Grem, 2016 ; Kruse, 2015).

4)      Sur le plan du droit, ces courants multiplient les batailles juridiques au nom du droit à la « liberté religieuse » (Tarlo, 2005 ; March, 2013 ; NeJaime, 2009 ; Roy, 2011), ou en produisant un discours victimaire, au moyen de catégories idoines (« christianophobie » ou « islamophobie » par exemple). Ils sont au cœur de multiples conflits juridiques et visent à éroder la séparation des sphères de rationalité, souvent en s’appuyant sur une conception de la « liberté religieuse », voire de la « liberté d'expression », taillée pour répondre aux exigences du croyant intégraliste.

5)      Cet activisme n’est pas confiné aux seuls prétoires ; mis à l’épreuve de diverses affaires, les arguments et lieux communs employés par les acteurs de ces mouvements intégralistes sont ensuite mobilisés en d’autres arènes, notamment les arènes académiques et médiatiques (Van Dussen, Piette, Paternotte, 2016 ; Gonzalez, 2014). Historiquement, il est avéré que les gestes rhétoriques des créationnistes évangéliques et/ou des tenant de l'« intelligent design » (Gross et Forrest, 2007 ; Girel, 2012)) et les arguments philosophiques des premiers zélateurs du « post-séculier » sont irrémédiablement mêlés (Stavo-Debauge, 2012 ; Gonzalez & Stavo-Debauge, 2015). La théorisation d’une « islamophobie d’Etat » proposée par certains sociologues, philosophes, anthropologues (Geisser, 2003 ; Hajjat & Mohammed, 2009 ; Asad, Brown, Butler et Mahmood, 2009 ; Liogier 2016) doit être réinterrogée à la lumière des stratégies de « victimisation » souvent mobilisées par les groupes intégralistes. Sert-elle à immuniser les formes les plus réactionnaires de l’islam contemporain – formes qui ne seraient donc pas justiciable d’une « critique séculière » (March, 2011 ; Mufti, 2011 ; Favret-Saada, 2016) ? 

Enjeux théoriques et méthodologiques : suggérer par des cas d’étude de nouveaux cadres et outils pour l’étude des intégralismes religieux

Les questions auxquelles les contributeurs sont invités à répondre ne sont pas tant celles de l’origine, du pourquoi cette irruption de l’intégralisme religieux, que celles du « où » et du « comment » ces courants intégralistes reviennent sur le devant de la scène, par quels chemins et en mobilisant quelles ressources. Le terme « irruption » fait référence à la soudaineté (au moins apparente) du phénomène, aux capacités de ces mouvements à se placer là où on ne les attendait pas : le marché (profane), l’école (républicaine), l’université (rationnelle), les arts et la culture (BD, cinéma), l’espace public, etc. Soit autant de lieux où ces mouvements peuvent s’efforcer de déverrouiller la résistance que leur oppose la société sécularisée, mais aussi de veiller à restreindre la critique des néo-orthodoxies et orthopraxies religieuses qu’ils diffusent et tentent d’imposer comme des standards de normalité et d’authenticité de l’identité religieuse et confessionnelle.

L’enjeu théorique sera dans un premier temps de définir de façon à la fois précise et opérationnelle la notion de « religion intégraliste » (et ses déclinaisons « fanatisme », «religion de dévots »), sans avoir immédiatement recours aux propriétés confessionnelles renvoyant à la spécificité de chaque religion en jeu : l’« intégrisme » ou le « traditionalisme » (catholique), le « fondamentalisme » et l’« évangélisme » (protestant), l’« islamisme » ou le « salafisme » (musulman). Il s’agira plutôt de caractériser et décrire ces courants intégralistes au travers de leurs ressorts communs, mais aussi par la façon dont ils agissent dans un même milieu et utilisent les appuis qui s’y rendent disponibles. On s’intéressera à leurs modus operandi, aux lieux qu’ils investissent, aux lieux communs qu’ils activent et avec lesquels ils mobilisent les fidèles. On essayera de comprendre comment ils parviennent à mobiliser des ressources locales (et comment celles-ci les mobilisent à leur tour) aussi bien qu’à immobiliser les résistances et les critiques dont ils font ou pourraient faire l’objet. Ce faisant, on visera la saisie de leurs dynamiques d’influences réciproques, de mimétisme, mais aussi de concurrence et d’opposition, parfois violentes.Les contributions seront basées sur des exemples concrets portant sur les sociétés sécularisées. 

Calendrier

Une publication des textes sélectionnés et présentés au colloque est d’ores et déjà envisagée.

Pour être publiés, les textes dans leur version intégrale devront être déposés sur la plateforme .

 

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